« Trop is te veel ». C’est ce qu’on commence à entendre sur les parvis des églises bruxelloises devant la gestion chaotique, sinon suicidaire, de l’archidiocèse depuis le départ de Monseigneur Léonard. Enquête de notre correspondant à Bruxelles.
Dernière actualité ? Les Fraternités monastiques de Jérusalem quittent Bruxelles. Pourquoi ? L’évêque leur demande de laisser l’église dans laquelle elles ont investi spirituellement et matériellement depuis quinze ans afin de se conformer au moule de la réforme des paroisses en « unités pastorales ». L’église « du Parvis » deviendra l’église centrale de Saint-Gilles. Comprendre : à terme la seule église en activité pour une commune de 50 000 habitants. On n’en revient pas à la lecture du communiqué des Fraternités (Les Fraternités monastiques de Jérusalem se retirent de Bruxelles, relayé sur Belgicatho, 21 février 2017: http://belgicatho.hautetfort.com/ archive/2017/02/21/les-fraternites-monasti ques-de-jerusalem-se-retirent-de-brux-5913393.html).
« Sus à la rumeur » (Fraternités de Jérusalem : un départ provisoire, dans La Libre Belgique, 9 septembre 2016 : http://www.lalibre.be/actu/belgique/fraternites-de-jerusalem-un-depart-provisoire-57d2d39035701f2d1172773b), disait un journaliste proche des évêques en septembre dernier. Un écho au communiqué « sus aux rumeurs » des évêques sur la Fraternité des Saints Apôtres en avril dernier (Église Sainte-Catherine : sus aux rumeurs, dans Catho-Bruxelles.be, site officiel du Vicariat de Bruxelles, 26 avril 2016 : http://www.catho-bruxelles.be/eglise-sainte-catherine-sus-aux-rumeurs/) ? Ça y ressemble…
La réforme des unités pastorales
L’idée des unités pastorales est simple, il s’agit de redémarrer un projet vieux de dix ans, mis à l’arrêt par Monseigneur Léonard, de fusionner les paroisses en « unités pastorales », désacraliser une partie des églises (Bruxelles : Toujours plus d’églises en voie de désacralisation, La Dernière Heure, 23 novembre 2016 : http://www.dhnet.be/regions/ bruxelles/bruxelles-toujours-plus-d-eglises-en-voie-de-desacralisation-5834ac89cd70a4454c040 fbb), et faire circuler les prêtres d’une paroisse à l’autre au cours des années. Les conséquences sont multiples : les prêtres sont détachés des paroissiens et sont isolés au maximum : qu’ils se contentent de donner les sacrements dans les quelques paroisses restantes. Les « unités pastorales » n’ayant aucune existence canonique, elles sont créées de toutes pièces par les évêques de Belgique et se prêtent mieux à ce qui semble être leurs priorités. Des responsables d’unités pastorales s’adressent au nom de l’évêque au curé et sont choisis selon leurs « compétences » : des hommes, des femmes, des prêtres, des laïcs, tout y passe. Les évêques belges ne peuvent plus attendre : le sacerdoce féminin, ils l’ont déjà inventé.
On se demande quelle est la cause : selon un très sérieux sondage Orela-le Soir-Ipsos-RTL vieux d’un an, la pratique religieuse est en augmentation à Bruxelles (Sondage Orela-le Soir-Ipsos-RTL, février 2016) ! Mais non, il faut fermer les églises, désacraliser, et fusionner le reste en unités pastorales. Autre argument avancé par l’épiscopat : l’entretien des églises coûte trop cher à l’État, dont la majeure partie est partagée entre la Région de Bruxelles-Capitale et les communes. Ce coût est de 4 € par an et par habitant (Ne fermez pas nos églises !, dans La Libre Belgique, 10 juin 2016 :
http://www.lalibre.be/debats/opinions/ne-fermez-pas-nos-eglises5759857b35705701fd82 b859).
« À Malines, on n’aime pas trop les communautés »
C’est ce qu’indique une source, aux antipodes de la gestion de Monseigneur Léonard qui en a accueilli tellement et de toutes sensibilités à Namur puis à Bruxelles. Les communautés déplaisent désormais : elles échappent en (trop grande) partie au contrôle diocésain, elles sont moins modelables. Et si ce sont des communautés accueillies ou fondées par Monseigneur Léonard – comme la Fraternité des Saints Apôtres -, c’est encore pire, le mot d’ordre semble être d’éliminer.
La collégialité et l’ouverture : les deux commandements suprêmes
Tout est justifié dernière ce mot, la sacro-sainte collégialité. Il se dit que plus aucune décision n’est prise par l’Archevêque, pourtant canoniquement responsable. C’est la conférence épiscopale par-ci, le conseil épiscopal par-là, composé de laïcs et de prêtres pour certains en places depuis 20 ans et qui n’ont pas hésité à se battre contre Monseigneur Léonard, qu’ils étaient supposés conseiller. Et désormais, ils gouvernent littéralement l’Église en Belgique et relisent l’agenda de l’Archevêque.
Quand ce n’est pas la collégialité, c’est l’ouverture qui justifie : le vice-président de la conférence épiscopale écrit un jour un livre dans lequel il demande de permettre la bénédiction religieuse des « couples » homosexuels (Bisschop Bonny pleit voor ritueel in de kerk voor holebikoppels, dans atv.be, 5 octobre 2016 : http://atv.be/nieuws/bonny-pleit-voor-ritueel-in-de-kerk-voor-holebikoppels), et l’autre l’Archevêque lui-même se rend dans la communauté de l’Abbé Gabriel Ringlet, connu pour être le plus hétérodoxe du pays (défenseur du « droit » à l’avortement, à l’euthanasie, ennemi public de son évêque, Monseigneur Léonard (Gabriel Ringlet appelle Mgr Léonard à la démission, dans Le Vif, 3 novembre 2010 : http://www.levif.be/actualite/belgique/ gabriel-ringlet-appelle-mgr-leonard-a-la-demission/article-normal-149249.html), et j’en passe…). À en croire, le site de la Communauté de Ringlet, ce n’est pas pour une remontrance suite à ses récents propos et écrits répétés sur l’euthanasie que la rencontre a été organisée (Échos de la rencontre avec M. le cardinal Jozef de Kesel, dans le site officiel du Prieuré Malèves-Sainte-Marie, 16 février 2017 : https://www.leprieure.be/index.php/au-jour-le-jour/des-echos/4263-echos-cardinal-fevr-2017).
Peu à peu, la confiance se rompt
Les fidèles et les prêtres se sentent trahis. Ils ne savent pas ce qui adviendra demain de leur paroisse, de leur communauté, de leur curé… Peu de haines chez eux, mais de la peur, de l’inquiétude et beaucoup de déception. Ils sont de plus en plus nombreux à réaliser ce que Monseigneur Léonard a dû endurer, à quelle obstination il a dû faire face. Rien n’est expliqué, tout est imposé. Nombreux sont ceux aussi à s’encourager mutuellement à prier pour leurs évêques, pour qu’un changement de politique survienne et qu’enfin, on encourage à nouveau les communautés florissantes au lieu de les fermer. Il y va de l’avenir de la Belgique. À la grâce de Dieu. (Aldo Di Marzo)