Le gouvernement Conte a obtenu la confiance, avec une large marge, tant à la Chambre des Députés qu’au Sénat mais surtout, il naît avec un large soutien populaire. Les sondages d’opinion attribuent en effet aux deux forces politiques qui l’expriment, le Mouvement Cinq Etoiles et la Ligue quelques 60 % des intentions de vote. Aucun gouvernement comme celui-ci n’a cependant rencontré l’aversion de la presque totalité des moyens de communication de masse italiens.
Antonio Socci a bien décrit ce « préjudice universel » dans les colonnes du quotidien Libero (3 juin 2018), alors que Marco Travaglio, dans les colonnes du Fatto quotidiano (6 juin 2018), a publié une longue anthologie de lourds jugements réservés au gouvernement naissant par presque tous les journaux, de gauche comme de droite. M. Conte a été accusé d’être « un ami du peuple comme Marat » (Il Corriere della Sera, 18 mai 2018) et de préparer « un avenir vénézuélien à l’Italie » (Il Foglio, 16 mai 2018). « Il existe un cas Italie en Occident » a écrit le directeur du quotidien La Stampa (27 mai 2018) alors que son homologue de La Repubblica indiquait « le mélange d’inexpérience, d’improvisation et d’arrogance ne tardera pas à émerger. Attachez vos ceintures ! » (2 juin 2018).
Ce sectarisme idéologique s’est traduit par une intolérance violente vis-à-vis du nouveau Ministre de la Famille, Lorenzo Fontana, coupable de s’être exprimé en faveur de la famille naturelle, protégée par l’article 29 de la Constitution, d’avoir relevé l’existence d’une crise démographique en Italie et d’avoir participé à la Marche pour la Vie du 19 mai dans les rues de Rome. Dans un entretien accordé au Corriere della Sera (2 juin 2018) et dans une lettre adressée au quotidien Il Tempo (4 juin 2018), Lorenzo Fontana réaffirme avec force ses opinions. Le nouveau Ministre de l’Intérieur, M. Salvini, a relevé, non sans raison, que ces idées ne font pas partie du contrat de gouvernement.
Il faut remarquer toutefois que l’Italie est une République parlementaire au sein de laquelle le gouvernement dispose de la fonction exécutive et le Parlement de la fonction législative. Pendant près de trente ans, de 1963 à 1992, l’Italie a été gouvernée par deux forces politiques, la Démocratie chrétienne et le Parti socialiste qui, sur les thèmes concernant la famille et la morale, avaient des visions opposées. Le divorce ne faisait pas partie du programme du gouvernement Colombo (1970-1972), pas plus que l’avortement de celui du gouvernement Andreotti (1978-1979), qui se basait au Parlement sur l’appui extérieur du Parti communiste.
Pourtant un certain nombre de parlementaires laïcistes présentèrent les propositions de loi en faveur du divorce et de l’avortement, qui furent respectivement approuvées en 1970 et en 1978, par des majorités parlementaires qui ne reflétaient pas la position de l’exécutif. Lorsque les Présidents du Conseil et de la République démocrates-chrétiens furent accusés d’avoir signé des lois qui étaient contre leur propre conscience de catholiques, ils répondirent avoir simplement contresigné des lois faites par le Parlement et non pas le gouvernement.
Or, dans le cadre du nouveau Parlement, ne serait-il pas possible que vienne à se créer une majorité transversale qui impose des changements législatifs en faveur de la défense de la vie et de la famille même si cela ne fait pas partie de l’accord de gouvernement ? L’Italie aurait-elle cessé d’être une République parlementaire ?
Le Ministre de la Famille, Lorenzo Fontana, dans sa belle lettre au quotidien Il Tempo, a déclaré : « Nous ne sommes pas effrayés de devoir affronter la dictature de la pensée unique. (…) Nous avons les épaules assez larges pour résister aux attaques gratuites en répondant par l’évidence des faits, la force des idées et le caractère concret des actions ».
Que le Ministre sache qu’il n’est pas seul. Derrière lui, se trouvent les hommes de bon sens, ceux qui considèrent une folie la théorie du genre, qui rejettent comme contre nature les unions homosexuelles, qui sont décidés à défendre la famille normale, fondée sur le mariage indissoluble, composée d’un homme et d’une femme, ceux qui se proposent de mettre au monde des enfants et de les éduquer et former pour en faire de bons citoyens de la terre et du Ciel.
Le Ministre peut compter sur l’aide de ces hommes et femmes de bonne volonté mais il peut aussi et surtout compter sur l’aide du Ciel, qui n’abandonne pas ceux qui n’ont pas honte de se proclamer catholiques, qui défendent la loi naturelle et combattent les nouveaux barbares pour le plus noble des idéaux qu’est la restauration de la Civilisation chrétienne, la seule de l’histoire à être digne de ce nom. (Roberto de Mattei)