Au printemps dernier, une chaîne de télévision diffusait un étonnant documentaire consacré aux « ennemis du pape François », personnalité fort aimée des journalistes français. L’on y découvrait que, parmi les périls menaçant le Souverain Pontife, Raymond Leo Burke venait largement en tête, avant la Maffia et DAESH …
Quiconque a eu le privilège de rencontrer le cardinal Burke peut mesurer l’extravagance insultante de cette affirmation. Restait à le faire savoir au grand public. Guillaume d’Alançon, en publiant Entretien avec le cardinal Burke (Artège, Paris 2015, 182 pages, 17,50 €), signe donc l’un des livres les plus nécessaires de cette rentrée.
Du jour où, jeune évêque de La Crosse aux États-Unis, Mgr Burke annonça, décision qui fit grand bruit, qu’il refuserait l’accès aux sacrements aux politiciens favorables à la culture de mort, il devint l’homme à abattre pour les progressistes, et un signe d’espoir pour les autres. Vingt ans après, rien n’a changé, sinon l’importance et l’influence d’un prélat appelé, dans l’intervalle, aux plus hautes fonctions et ramené sous les feux de l’actualité lorsque, l’an passé, lors des premières réunions synodales, celui qui était alors Préfet du Tribunal suprême de la Signature apostolique, s’est naturellement imposé comme le chef de file des défenseurs du mariage catholique.
Dans l’ambiance surchauffée du moment, sous la pression de médias et d’une opinion réclamant l’accès aux sacrements pour les divorcés remariés et la reconnaissance des unions homosexuelles, il fallait un incontestable courage pour endosser ce rôle. Le cardinal Burke n’en manque pas, il l’a maintes fois prouvé. Dans ce contexte, son éviction de ses fonctions à la Curie et sa nomination comme « patronus » de l’Ordre de Malte sont apparues à beaucoup une sanction de ses prises de position.
Dans le long entretien accordé à Guillaume d’Alançon, le Cardinal dit se refuser à voir une punition en ce choix et s’y soumettre joyeusement, puisqu’il s’agit de la volonté divine. D’emblée, le ton est donné : Mgr Burke est un prélat de prière et de foi, apte à tout replacer dans l’optique de Dieu. Cependant, s’il s’en remet à la Providence, il n’entend pas pour autant cesser le bon combat.
En des chapitres brefs, parfois laconiques, il va à l’essentiel sur les grandes questions qui intéressent l’avenir du monde et de l’Église. Très au fait de la situation, non seulement aux États-Unis mais aussi en France et dans toute la catholicité, Mgr Burke sait dénoncer les véritables maux de notre temps, à commencer par un relativisme qui n’épargne pas toujours fidèles et pasteurs.
Parce que certains principes ne sont définitivement pas négociables, Mgr Burke n’hésite pas à se dresser contre tous ceux prêts à chercher des accommodements honteux avec le monde, brader la vérité évangélique et l’enseignement de Notre Seigneur en échange de faveurs mondaines. Lui ne lâche rien, reste intégralement fidèle et demande aux autres de suivre cet exemple. Pour y aider, il prône le retour aux lois éternelles, le recours aux sacrements, la catéchèse intelligente, le saint sacrifice de la messe dignement célébré en se dispensant des fantaisies et verbiages dans lesquels tant de paroisses se sont égarées depuis cinquante ans, la formation de jeunes prêtres libérés des dérives post-conciliaires.
Si la charité n’est jamais absente de son discours, sa fermeté, son refus des circonlocutions mondaines, sa rigueur doctrinale, toutes vertus dont nos contemporains, même catholiques, ont perdu l’habitude, ne manquera pas de lui valoir de nouveaux ennemis. Mais les lecteurs qui goûteront cette parole d’un pasteur sûr de sa foi et de son rôle béniront le Ciel que l’Église possède encore des princes de cette trempe. (Anne Bernet)