Tout fut étrange dans la succession d’élections que vient de connaître la France : élection présidentielle puis élections législatives. Et d’abord l’attitude du Président sortant, candidat à sa propre réélection qui, pourtant, ne semblait pas daigner faire campagne, comme si l’élection n’était qu’une fastidieuse formalité. Il ne s’engagea donc que faiblement dans la campagne du premier tour, comportement surréaliste puisque c’était son bilan qui était en cause.
L’issue du premier tour réserva donc son lot de surprises : en premier lieu l’échec retentissant de la candidate du centre droit, Les Républicains, qui ne recueillit que 4,78% des voix ! Quant à la candidate du Parti socialiste, maire de Paris, elle n’obtint que 1,75% des suffrages. Ainsi les deux partis qui se succédèrent au pouvoir depuis 1981 sont-ils quasiment réduits à des formations marginales. Les Verts qui avaient connus quelques succès électoraux locaux, n’atteignirent même pas 5% des suffrages. En revanche, le leader trotskyste de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, rassembla sur son nom 21,95%. Ce tribun qui se donne des airs de Danton, admire Chavez et semble rêver d’ériger à nouveau la guillotine place de la concorde, réussit à fédérer le mécontentement de l’électorat de gauche. Marine Le Pen confirma sa position de leader du premier parti d’opposition avec 23,15% des suffrages, quatre points et demi derrière M. Macron. Eric Zemmour, partit en fanfare dans la campagne, la traversa comme une comète, pour finir à un peu plus de 7%.
Le deuxième tour de l’élection présidentielle fut tout aussi bizarre. D’abord parce que le duel Macron/Le Pen était précisément celui que les Français auraient voulu éviter. Ensuite, parce qu’Emmanuel Macron, sûr de son succès, fit une campagne a minima, plus intéressé par l’illusoire présidence européenne que par la politique française. Lors du débat qui l’opposa à Marine Le Pen, il afficha une attitude désinvolte et méprisante comme s’il se soumettait à un exercice aussi ennuyeux qu’inutile. Mais il se contenta d’asséner un étalage technocratique de chiffres sans souffle politique. Il l’emporta, certes, avec 58,55% des voix mais plus de 28% d’abstentions et 9% de votes blancs et nuls. Ainsi 38% des électeurs avaient boudé ce scrutin majeur des institutions françaises. Par rapport au précédent scrutin, Mme Le Pen avait gagné 2,6 millions de voix tandis que son adversaire en avait perdu 1,9 millions. En toute logique, ces scores et le fait que près de 40% des électeurs aient montré leur désintérêt pour l’élection, auraient dû alerter le Président. Au lieu de cela, il délivra un discours convenu et insipide au pied de la tour Eiffel, nomma un Premier ministre, Mme Borne, presque caricaturale en matière de technocratie. Et repartit vers les délices des fanfaronnades européennes. Pourtant se profilaient les élections législatives qui décideraient des possibilités d’action du nouveau Gouvernement.
Là encore, nous assistâmes à une non campagne. Tout le monde semblait se désintéresser du scrutin, hormis le leader de l’extrême gauche, Jean-Luc Mélenchon, qui réussit à constituer une alliance hétéroclite rassemblant trotskystes, islamo-gauchistes, communistes, verts et socialistes. Bref, le néo marxisme dans toutes ses formes sous le titre de Nouvelle union populaire, écologique et sociale, dont le chef vitupérait et affirmait qu’il remporterait les élections législatives pouvant ainsi accéder au poste de Premier ministre. Avec l’aimable bienveillance des médias de gauche. Le Rassemblement national, quant à lui, faisait une campagne de terrain à bas bruit, tandis que les Républicains se demandaient s’ils survivraient au désastre. Le parti présidentiel, égal à lui-même se montrait sûr de lui, méprisant et désinvolte, mais le résultat du premier tour suscita un vent de panique. Pour la première fois dans l’histoire de la Vème république française, le parti présidentiel, après une large réélection de son chef, risquait de ne pas obtenir la majorité absolue.
Risque qui se transforma en dure réalité au lendemain du second tour. Les partis soutenant Emmanuel Macron étaient loin d’obtenir la majorité absolue, situation inédite ! Avec 245 députés, il manque 44 sièges pour obtenir la majorité absolue. Ainsi privé de majorité le gouvernement de Mme Borne sera réduit à rechercher des majorités de rencontre pour faire voter ses textes. Tantôt à gauche, notamment sur les questions de société. Tantôt à droite sur les questions économiques.
Fait marquant, le Rassemblement national emporte 89 sièges et devient le premier groupe d’opposition. Echec patent pour le système et première rupture du « plafond de verre » qui bloquait la progression de ce parti. L’hétéroclite alliance de la gauche, la NUPES, obtient 131 sièges mais sans constituer un groupe parlementaire unique. La France insoumise, parti d’extrême gauche qui avait tiré l’alliance, constitua son propre groupe de 75 députés. Les socialistes et apparentés, qui avaient gouverné douze ans sous Mitterrand, cinq sous Chirac et qui détenaient le pouvoir sous Hollande, n’ont plus que 27 députés. Les Républicains ont un sort à peine plus enviable avec 59 députés, alors que cette famille politique avait 308 députés en 2007, 215 en 2012, et 112 en 2017. Une chute continue qui démontre l’impasse politique dans laquelle elle s’est enfermée.
Autre constat, le taux d’abstention a été proche de 54% et si l’on décompte les votes blancs ou nuls c’est plus de 57% des électeurs qui ont se sont détournés des élections législatives ou refusés de choisir. Ces résultats démontrent d’abord que l’offre électorale ne répond nullement à l’attente des Français, qui ne font aucune confiance à leur classe politique. Ils la jugent lointaine, indifférente à leurs difficultés et impuissante. Or cette impression correspond à une réalité tant les Etats ont abandonné leur souveraineté entre les mains de l’Eurocrature bruxelloise. Aujourd’hui, l’Assemblée nationale passe 70% de son temps à introduire des directives européennes dans le droit positif Français !
Emmanuel Macron, qui avouait avoir dû « apprendre à aimer les Français » semblent lassé du pouvoir comme s’il considérait que les Français ne le méritaient pas ! Il se retrouve, par sa seule faute, privé de majorité stable. La crainte de la dissolution lui permettra peut-être de gouverner à vue, au coup par coup. Certaines des réformes qu’il considérait comme emblématiques, la réforme des retraites notamment, sont devenues impossibles, en tous les cas selon ses vœux.
Le centre droit, quant à lui, ne tire aucun enseignement de ses échecs et s’enfoncent dans la bêtise. Par soumission aux oukases de la gauche politique et médiatique, il a confié la présidence de la Commission des finances à un trotskyste plutôt que de chercher un accord avec le Rassemblement national !
A l’issue de ces scrutins Emmanuel Macron, l’arrogant jeune président auquel rien ne résistait, est devenu « Emmanuel le déconfit ». Sans majorité stable, il en est réduit à des accords de circonstance. Son passage au pouvoir laissera un souvenir de sinistre gâchis, et sa seule efficacité aura été dans la déconstruction accélérée de la société française et de la souveraineté de la France. Triste bilan pour un bien triste sire.