France: rétablissement de la peine de mort

France- rétablissement de la peine de mort
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France- rétablissement de la peine de mortL’on avait beau s’y attendre, les deux décisions de justice, tombées ces 24 et 25 juin 2014, causent un choc. Ce fut d’abord, le 24, l’arrêt du conseil d’État ; ses dix-sept juges, suivant l’avis du rapporteur plutôt que ceux de l’Académie de médecine et des experts, ont décidé, dans « l’affaire Vincent Lambert », de donner raison au médecin et à l’épouse de ce grand handicapé et d’autoriser l’arrêt des soins, de l’alimentation et de l’hydratation, assimilés à de « l’acharnement thérapeutique ».

Ainsi donc, Vincent Lambert, plongé dans un état végétatif, sans espoir, à vues humaines, d’amélioration ou de guérison, socialement inutile, devenu, pour une partie de sa famille, une entrave, doit « partir », comme le dit son neveu … Dans son intérêt et celui de ses proches … Ses médecins feront légalement le nécessaire.

« Ce fut la décision la plus difficile que nous ayons jamais eu à prendre », ont soupiré les juges de la plus haute instance du droit administratif français. Ils l’ont prise, cependant, rétablissant, pour un innocent, la peine capitale abolie en 1981.

Inutile de s’appesantir sur la perte totale de sens de la vie et de la mort, du bien et du mal, du licite et de l’illicite qui, depuis des mois, préside à la sinistre médiatisation, toujours en faveur des partisans de l’euthanasie, passive ou active, de ce drame. Nous savons bien que, dans la république française, aucune norme morale ou religieuse ne saurait être invoquée pour s’opposer au législateur, ou plutôt aux réseaux qui le manoeuvrent en coulisses. Est bien, désormais, ce qu’une majorité changeante estime bien, mauvais ce qu’elle estime mauvais. Ceux qui s’aventureraient à contester ce relativisme seraient aussitôt, à l’instar des parents de Vincent, qui n’ont cessé de mettre en avant leurs convictions catholiques, traités « d’intégristes » et de « fanatiques ».

Maître Triomphe, avocat de M. et Mme Lambert, a aussitôt interjeté appel de cet arrêt de mort devant les instances européennes et obtenu la suspension de l’exécution. Ce sursis ne modifie cependant en rien la gravité de la décision.

Il faut souligner en effet la portée d’un arrêt qui fera jurisprudence dans les affaires similaires. Environ 1 800 personnes, pour la plupart jeunes victimes d’accidents de la route, se trouvent, en France, dans le même état que Vincent. Il suffira que certains de leurs proches, las d’entourer ces grands handicapés, – et il est vrai que de tels malheurs sont très lourds à porter au quotidien, surtout en l’absence de toute espérance surnaturelle –, en fassent la demande, ou que le médecin le leur suggère, « par compassion », pour que soit enclenché le processus de mise à mort. En attendant que l’État décide seul de supprimer ces « inutiles », ce qui arrivera tôt ou tard si le protocole ne se grippe. Gare, alors, à tous ceux qui ne correspondront pas aux critères en vigueur : vieillards, malades mentaux, handicapés, malades incurables ou chroniques et autres irrécupérables de notre société de consommation. L’on a déjà vu cela ailleurs …

L’étrange et indécente effervescence de la presse et du public autour de Michael Schumacher, que les médias n’hésitaient pas, quelques jours avant son transfert dans un établissement de soins suisse, à décrire comme définitivement « réduit à l’état de légume », est un autre révélateur des mentalités ambiantes : ceux-là même qui l’idolâtraient hier quand il triomphait sur les circuits automobiles prennent en horreur le champion tombé qui ne les fera plus rêver et en arrivent à souhaiter sa mort… Variante contemporaine des jeux du cirque qui vouaient le gladiateur vaincu au trépas. À ce détail près qu’il ne s’agit plus de donner la mort et la souffrance en spectacle mais, au contraire, de les cacher, tels des phénomènes honteux que l’humanité éclairée ne saurait plus tolérer puisqu’ils lui rappellent son intolérable condition mortelle.

C’est cette terreur de la mort et de la douleur, instrumentalisée par les partisans de l’euthanasie, qui explique l’acquittement, ce 25 juin, par la cour d’assises de Pau, de Nicolas Bonnemaison, médecin urgentiste de l’hôpital de Bayonne, accusé d’avoir, de son propre chef, en 2010-2011, administré des médicaments létaux à sept patients qu’il avait pris en charge et dont il estimait charitable d’abréger « la fin de vie ». Étonnées des décès soudains dans le service, lors des gardes du docteur Bonnemaison, de personnes qui ne semblaient pas à l’article de la mort, des infirmières, après avoir retrouvé les ampoules de poison, avaient dénoncé le médecin.

Décrit comme psychiquement instable, plusieurs fois interné, Bonnemaison qui, aux dires de certains témoins, pariait des gâteaux au chocolat sur les chances de survie de ses malades, et parut très surpris quand les enfants d’une de ses victimes lui reprochèrent de les avoir empêchés d’assister leur mère jusqu’au bout, comme s’il n’avait jamais envisagé cet aspect de la question, n’avait sans doute pas l’équilibre nécessaire pour supporter la pression de ses responsabilités professionnelles. Il semble avoir inspiré aux proches de ses victimes plus de pitié que de haine. Pitié qui s’est communiquée au jury ; allant plus loin que l’avocat général, qui demandait une peine symbolique de cinq ans de prison avec sursis, celui-ci a voté l’acquittement. Aux applaudissements effrénés des partisans, très mobilisés, du « droit à mourir dans la dignité, de l’euthanasie et du suicide assisté ».

S’engouffrant dans la brèche, le président Hollande, fidèle à sa politique sociétale, les seuls engagements de sa campagne qu’il s’acharne à tenir coûte que coûte, a immédiatement profité de cette actualité pour annoncer la création d’un comité d’étude sur la fin de vie. Ses conclusions, ô combien prévisibles, seront révélées à la fin de cette année et entraîneront un changement de la législation actuelle. Reste à savoir si un pouvoir socialiste discrédité totalisant 12 % des suffrages peut encore se permettre d’imposer ses vues en ces domaines brûlants. Fielleux, les médias s’interrogent déjà sur la réaction des participants aux Manifs pour tous de l’an dernier contre « le mariage » homosexuel et leur capacité à remobiliser leurs troupes en vue de ce nouveau combat. Vital. (Anne Bernet)

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