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UE : institutions plus faibles après le tremblement de terre électoral

séisme politique
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séisme politiqueAu lendemain des élections européennes, l’expression « séisme politique » paraît quand même un peu surfaite. Le FN a bien séduit un quart des votants et UKIP a fait même mieux en Grande-Bretagne (27,5 %), mais il est probable que ces résultats exceptionnels resteront sans effets au niveau politique. Le Parlement européen dispose de très peu de pouvoirs – c’est une simple caisse de résonnance – et que peuvent faire 100 eurosceptiques sur 750 députés. Bien sûr, c’est un signal pour ceux qui voudront l’entendre (mais il n’est pas dit que la classe politique de l’Union européenne ait des yeux et des oreilles).
Un autre signal, beaucoup plus fort, a été donné par les abstentionnistes. Par rapport aux élections de 2009, le taux de participation est resté le même : 43% de la population votante a voté. Dans certains pays comme la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Espagne, le taux de participation s’est légèrement élevé par rapport à 2009, sans pour autant dépasser la barre des 50%. Mais il a baissé en Italie, en Pologne et dans la plupart des autres pays de l’Union avec une chute dramatique en Lettonie où il est tombé de 53,7 % à 30 %.

Certains pays affichent des taux de participation réellement inquiétant : 25 % en Croatie, 19,5 % en République tchèque, 13 % en Slovaquie – ce qui jette un doute sur l’enthousiasme européen qu’on a prêté à ces nouvelles recrues. Si l’on excepte les taux de participation de la Belgique (90 %) et du Luxembourg (90 %) où le vote est obligatoire, le meilleur taux de participation est celui de Malte avec 74,8 %.

Cet abstentionnisme massif dans l’Union européenne ramène les résultats électoraux à des proportions plus modestes, par exemple le FN n’obtient en réalité que 11% sur la totalité de la population française votante. Mais surtout, cela sape la légitimité des institutions représentatives de l’Union européenne. Dans un système politique démocratique où le principe de majorité est le seul qui devrait s’imposer, il est pour le moins paradoxal qu’on accepte sans broncher des résultats électoraux basés sur moins de la moitié de l’électorat.

Jusqu’où peut-on aller ? Si le taux de participation tombait 10 % ou 5 %, considérerait-on encore les résultats comme valables et représentatifs. Ne serait-ce pas la négation même de la démocratie ? Or on n’en est pas loin si l’on additionne les taux d’abstention à ceux des partis eurosceptiques.

Certes, tout observateur attentif de la démocratie parlementaire sait bien que ce régime n’est pas celui de la majorité mais celui de la plus forte minorité et les plus récents développements ont montré que cette force, la minorité ne doit pas nécessairement la tenir du nombre, mais elle peut simplement la tirer de son organisation, de sa richesse ou de sa position idéologique dominante dans les médias. Mais cela relève de la pratique déviante d’un régime dont les principes sont éminemment discutables ; ce n’est pas ce que le régime dit de lui-même. Si l’on s’en tient aux principes démocratiques de l’Union européenne (et des leçons de démocratie qu’elle prétend donner aux autres), c’est la règle de la majorité qui s’applique. Or la majorité se tait. On ignore son silence. On évite d’en demander les raisons. On méprise les abstentionnistes.

Un régime politique, quel qu’il soit, s’il ne s’appuie pas sur un consentement majoritaire ou s’il se heurte à un désaveu majoritaire, est voué à l’échec. Si l’Union européenne ne comprend pas ce signal, son sort est fixé à plus ou moins brève échéance. (Christophe Buffin de Chosal)

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