Dans une allocution au Parlement européen, le député britannique Nigel Farage avait interpellé le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, sur le ton de « bienvenue au club ». Il lui faisait remarquer que la Hongrie avait été assez heureuse de s’être débarrassée de la tutelle de l’URSS et se demandait pourquoi elle avait été si pressée de rallier l’Union européenne et de reperdre ainsi l’indépendance qu’elle venait de gagner. Orban ne savait pas si, en entendant de tels propos, il devait adopter le sourire méprisant que le Président de la Commission européen, José Manuel Barroso, a l’habitude d’arborer.
Il devait se rendre compte qu’il y avait du vrai dans ce que disait Farage. Or l’Union européenne n’a pas tardé à frapper. Viktor Orban, bien décidé à grader le contrôle de l’économie hongroise, s’est trouvé sous le feu de la Commission européenne, du Fonds monétaire international (FMI) et des agences de notation. Il reçut une lettre du président de la Commission, José Manuel Barroso, le sommant de « retirer » deux projets de loi jugés contradictoires avec le traité de l’Union.
Le ministre hongrois des Affaires étrangères, Janos Martonyi, a alors annoncé, mercredi 21 décembre, que le gouvernement comptait faire adopter avant Noël au Parlement les deux textes, qui touchent l’indépendance de la banque centrale et la politique fiscale.
Le même jour, l’agence Standard and Poor’s dégradait en catégorie spéculative la note attribuée à la dette de la Hongrie, en évoquant les « politiques publiques imprévisibles » menées à Budapest.
La première de ces « lois fondamentales » prévoit de fusionner le directoire de la Banque nationale de Hongrie (MNB) avec un Conseil monétaire élargi, où le président de la banque centrale verrait ses prérogatives réduites. Un amendement propose que le Parlement puisse limoger des membres du Conseil monétaire lorsque ceux-ci « agissent contre l’intérêt du pays ». L’autre projet de loi impose une majorité parlementaire des deux tiers pour décider de tout changement dans la fiscalité, ce qui empêcherait les nécessaires ajustements en cas de dérapage du déficit ou de la dette (“Le Monde”, 23 décembre 2011).
Cette affaire tend à révéler le visage totalitaire de l’Union européenne. Désormais l’indépendance législative des Etats membres est une illusion, rapidement perdue en cas de conflit avec le pouvoir central. « Dans le cas de la Hongrie – précise Michel Janva (11/1/12) – ce qui doit inquiéter, c’est la campagne de dénigrement menée contre le gouvernement de centre-droit par les bureaucrates de Bruxelles et la grande presse européenne : avec le prétexte de certaines mesures certainement discutable, en réalité, ce qui est dans le collimateur, ce sont les principes fondamentaux de la Constitution de la Hongrie: la revendication des racines chrétiennes, la promotion de la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme, la défense de la vie.
Ce qui est recherché, c’est donc une homogénéisation culturelle qui a comme point de référence les (anti) valeurs dominantes en Europe du Nord. (…) En d’autres termes, nous sommes confrontés à un processus d’homologation, tant sur le plan culturel que sur celui strictement politique et économique, qui est la négation même de l’idée originelle de l’Union européenne, où les différences et les particularités de chaque État devaient être une source d’enrichissement mutuel ».
Mais l’Union européenne n’est pas à court de ressources. La Hongrie « endettée à hauteur de 82 % de son PIB, est financièrement pris à la gorge ». Le Pays a besoin de plus de 15 milliards d’euros cette année pour faire face à ses échéances. Mais en réaction au train de mesures très controversées du premier ministre Viktor Orban, l’Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) ont interrompu les discussions le mois dernier sur l’octroi d’un nouveau prêt d’urgence.
« Actuellement, le FMI et l’Europe n’ont aucune raison d’accorder des prêts », juge Tamas Bauer, ancien parlementaire et nouveau vice-président du parti d’opposition Coalition démocratique. « Si le gouvernement rejette les demandes de l’UE et du FMI, il y a un vrai danger d’effondrement financier » (“Le Figaro”, 3 janvier 2012). (G. de B.)